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Le blog de Guillaume Poutrain Expert en aphorismes et fragments narratifs ! (Des femmes, de la philosophie, de la beauté, de la vie en société...)

Les moules normandes.

Guillaume Poutrain

                                              

"Tout porte à croire qu’il existe un certain point de l’esprit d’où la vie et la mort, le réel et l’imaginaire, le passé et le futur, le communicable et l’incommunicable, le haut et le bas cessent d'être perçus contradictoirement." Cette pensée d'André Breton m'est revenue à l'esprit tandis que je contemplais un estuaire, c'est à dire le point de rencontre entre la terre et la mer, le doux et le salé, le mobile et l'immobile... Et il se dégageait de ces contradictions résolues entre l'âme et l'esprit un charme et une beauté évidentes.

Il est dix heures, nous sommes à la mi-juillet, le temps est superbe. Quelques mouettes suivent paresseusement le tracteur sur lequel je me trouve, roulant au milieu des eaux… Mon premier tracteur… Et ce n'est pas pour récolter de la betterave ou des pommes de terre, mais des moules. Autour de moi, des dizaines de sacs, "des poches" (terme qui vient de la Charente, employé dans le sud-ouest pour désigner un sac) posées sur des tables, comme des fortifications précaires rappelant les plages voisines d'Utah et d'Omaha. De toute façon la marée aura bientôt tout recouvert. Estuaire. Je marche dans la baie des Veys. En face de moi, Isigny, berceau normand de la crème, du beurre et des caramels… Cette baie est devenue également, depuis les années 70, un parc à huîtres et à moules. Mr Taillepied, dont la production annuelle avoisine les 100 tonnes de moules par an, indique que des charentais à la recherche de nouveaux sites propres à l'élevage de coquillages ont estimé que l'endroit était propice à l'élevage. J'y reviendrai quand je parlerai des huîtres, mais j'attends un mois en "r" pour cela…

Les moules, donc. Nous sommes ici en bon voisinage. Au nord, Barfleur et ses gisements naturels de moules (avec une pêche réglementée à la façon des Saint-Jacques). Plus loin, au sud, le mont Saint-Michel et ses fameuses bouchots AOC, les plus goûteuses peut-être. A propos de bouchots, la légende veut qu'un Irlandais ait fait naufrage au XIVème siècle près de la Rochelle. Etabli dans le pays, il remarqua que les piquets plantés dans la vase pour tendre des filets destinés à la capture des oiseaux se couvraient de moules. Ainsi naquirent les bouchots, d'après deux mots d'origine celtique, bout (clôture) et chaos (bois). De toute façon, nos moules d'Isigny ne connaissent pas le bouchot (il n'y a pas assez d'eau)… Elles sont élevées comme les huîtres, dans ces fameuses poches reposant sur des tables découvertes à marée basse, ce qui permet de les retourner régulièrement afin qu'elles profitent de la lumière du ciel. Le naissain (c'est à dire les larves) provient de Vendée. On les transfère de sac en sac au fur et à mesure de leur croissance. Comptez deux ans environ. Pendant ces explications, je regardais du haut de mon tracteur la baie étalée à mes pieds, les échassiers flottant dans la lumière safranée, ces robustes pêcheurs tournant et retournant leurs sacs de coquillages, la ronde des tracteurs et le silence de l'infini, – songeant que si l'Eternel m'avait offert la poésie des estuaires, je compulserais son livre à ciel découvert, pour le simple plaisir d'évoquer, comme un premier baiser entre la terre et la mer, cette brume au loin qui voile les dessous de cette étreinte.

Le soir venu, Bénédicte et moi avalions deux kilos de moules d'Isigny. Elles étaient vraiment délicieuses, plus charnues que les mont Saint-Michel, davantage colorées que les Barfleur, iodées comme le verre de Valençay qui leur faisait honneur. Il suffisait d'offrir ce bouquet de saveurs au bonheur d'exister.

 

Moules d'Isigny de Philippe Taillepied, 14230 Isigny-sur-Mer. T: 02.31.22.76.80

 

                                     Mouclade au curry.

 

 

Préparation : 20 mn
Cuisson : 10 mn

Ingrédients (pour 4 personnes) :

2.5 kg de moules d'Isigny ou du Mont-saint-Michel
50 g de beurre
1 échalote
1 verre de vin blanc sec
1 verre à liqueur de cognac
1 cuillerée à café de farine
1 bol de jus de cuisson des moules
1 cuiller à café de curry
1 jaune d'œuf
100 gr de crème fraîche
jus d'un demi-citron
poivre


PREPARATION DES MOULES :


Grattez bien les moules et lavez-les à grande eau.

Dans une cocotte faites chauffer une noix de beurre avec l'échalote hachée, les moules arrosées du verre de vin blanc et du poivre.

Quand elles commencent à s'ouvrir ajoutez le verre de cognac et flambez.

Couvrez ensuite, en secouant la cocotte pendant 5 mn.

Egouttez les moules et récupérez le jus de cuisson. Passez-le au chinois pour éliminer le sable et les impuretés.


SAUCE :


Faites fondre le restant du beurre dans une casserole et ajoutes la farine en délayant avec un fouet jusqu'à ce que le mélange soit mousseux. Ajoutez alors le bol de jus de cuisson des moules et le curry. Laissez épaissir à feu très doux pendant 10 mn.
Dans un bol mélangez le jaune d'oeuf, le jus de citron et la crème fraîche. Une fois bien mélangé, incorporez doucement la sauce bien chaude et versez la préparation sur les moules.

 

 

Parti pris


La cave Saint Maclou  recommande la "cuvée Marie", un Jurançon sec 2004, domaine Charles Hours, à 11.80 €.

On peut aussi essayer un Savennières ou un côtes du rhône blanc, voire un riesling bien sec.

Cave Saint Maclou, 158 rue Martainville. 02.35.07.55.59

 

 

 

 

 

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